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UKV-FTA : Qui gagnera quoi ?

L’Accord de libre-échange Royaume-Uni — Viêt Nam (UKV-FTA) est entré en application depuis le 1er janvier 2021. Nous revenons sur les perspectives de cet accord important pour les deux pays. L’UKV-FTA est la porte d’entrée du Royaume-Uni dans le marché de l’ASEAN, via Hanoi. Aussi, Londres vient d’entamer les négociations pour son adhésion à l’accord de « Partenariat transpacifique global et progressif » (CPTPP) qui devrait lui ouvrir une zone commerciale encore plus vaste afin d’établir l’équilibre de l’après-Brexit.

Les faits :
  • Le Viêt Nam est un moteur important du commerce international de l’ASEAN, notamment avec ses principaux partenaires commerciaux. La part du Viêt Nam dans le commerce total de marchandises avec le Royaume-Uni est passée de 8,1 % à 14,4 % entre 2010 et 2014, puis à 18,6 % en 2019.
  • Le Royaume-Uni est un acteur de premier plan dans le commerce mondial. En 2019, le Royaume-Uni a exporté pour 469,7 milliards de dollars américains et importé pour 695,8 milliards de dollars de marchandises, alors que ces chiffres respectifs étaient de 411,8 milliards de dollars et de 279,2 milliards de dollars pour les services commerciaux. Bien que le commerce international de marchandises du Royaume-Uni ait diminué ces dernières années, ses échanges avec l’ASEAN et le Viêt Nam ont enregistré une forte croissance. Le commerce de marchandises avec le Viêt Nam a augmenté de 9 % par an entre 2014 et 2019.
  • Le Royaume-Uni devient un investisseur de plus en plus important dans l’ASEAN. Le total des échanges de biens et de services s’élevait à 52,13 milliards de dollars en 2019, soit une augmentation de 12,2 % par rapport à l’année précédente.
L’analyse :
  • La dynamique actuelle de ces liens économiques dans le contexte de la pandémie de CoVid-19 et de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine laisse penser que l’ASEAN et le Viêt Nam seront des partenaires de plus en plus importants pour le Royaume-Uni dans la poursuite de sa stratégie de relance économique post-Brexit.
  • L’accord de libre-échange UKV-FTA est une étape stratégique pour le Royaume-Uni.
  • L’UKV-FTA constitue également un grand coup de pouce pour le Viêt Nam en matière d’exportations, d’IDE et d’engagement des entreprises britanniques dans les efforts du pays pour construire la nouvelle chaîne de valeur. Moins dépendante de la Chine.
L’avantage à court et à moyen terme pour le Viêt Nam, à plus long terme pour le Royaume-Uni :
  • À court terme, les catégories de produits qui représentent une part importante ou un taux de croissance rapide des échanges de marchandises entre les deux pays devraient être les plus bénéficiaires de cet accord de libre-échange.
  • Le Viêt Nam servira de « tête de pont » et de porte d’entrée du Royaume-Uni dans l’ASEAN, le CPTPP et RCEP. Londres aura un accès direct et global à Hanoi pour les questions de diplomatie, de géopolitique régionale.

Ces catégories de produits peuvent être classées en trois groupes.

  • Le premier groupe est constitué de produits fabriqués par le Viêt Nam, qui comprend les vêtements, les chaussures, les fruits de mer, le café, les fruits et les noix.
  • Le deuxième groupe comprend les produits fabriqués par le Royaume-Uni, notamment les produits pharmaceutiques, la pâte de bois, les véhicules et les pièces détachées.
  • Le troisième groupe — le plus stratégique — comprend des catégories qui feront l’objet d’exportations importantes de la part des deux pays, notamment les machines d’outil et les appareils mécaniques, l’électronique, les meubles, les produits sidérurgiques, les avions et les pièces détachées, les produits de la défense.
  • Notes : Ce troisième groupe jouera un rôle stratégique dans le renforcement des liens économiques entre les deux pays en favorisant leur participation aux chaînes de valeur mondiales. Ce groupe sera aussi le moteur des relations stratégiques en diplomatie, du soft-power, pour la Mer de Chine méridionale et en l’intelligence géopolitique. Pour Hanoi, il servira en particulier de deuxième « pont » reliant le Viêt Nam aux États-Unis.
  • L’Accord de libre-échange UKV-FTA jettera des bases solides pour un partenariat à long terme. Les deux pays devraient aller au-delà d’une focalisation sur les gains à court terme.
Les faiblesses du Viêt Nam :
  • Les principaux défis du Viêt Nam sont la faible productivité et la faible capacité d’innovation. La productivité du travail dans le secteur manufacturier vietnamien représente un dixième de celle du Royaume-Uni.
  • En ce qui concerne la capacité d’innovation, la part du Viêt Nam dans l’ASEAN est minime — 0,1 % des exportations et 2,3 % des importations pour les redevances intellectuelles en 2019 — par rapport à ses parts dans le commerce de l’ASEAN et les flux d’IDE.
Les atouts du Viêt Nam :
  • Le Viêt Nam peut tirer parti des atouts spécifiques du Royaume-Uni dans les services liés à la recherche et au développement et dans les services de conseil en gestion.
  • En tant que fournisseur mondial de premier plan dans cette catégorie de services — l’exportation de 111 milliards de dollars US en 2019 —, le Royaume-Uni dispose d’un grand potentiel pour aider le Viêt Nam à stimuler la productivité de sa main-d’œuvre et l’innovation au cours des 5 à 10 prochaines années.
  • Le Viêt Nam devrait étendre son partenariat privilégié avec le Royaume-Uni dans le domaine de l’enseignement supérieur afin de garantir que ses écoles et universités auront accès à des enseignants de langue maternelle anglaise via des plateformes en ligne.
  • Le Viêt Nam peut aider le Royaume-Uni à renforcer sa présence au sein de l’ASEAN et le soutenir dans son adhésion au groupe commercial de l’Accord global et progressif pour le partenariat transpacifique (CPTPP).
  • La forte présence d’une communauté vietnamienne au Royaume-Uni. Toutefois, le Viêt Nam devra régler la question de l’immigration clandestine dans ce pays, et d’autres problèmes sociaux, de criminalité comme la production de cannabis.
Les points cruciaux du Royaume-Uni :
  • Les principaux défis du Royaume-Uni consistent à revitaliser son économie grâce à un dynamisme et à un engagement au niveau mondial. La réussite de cette entreprise est le seul moyen pour le Royaume-Uni de justifier son coûteux Brexit.
Le Royaume-Uni frappe à la porte de CPTPP

Londres va postuler pour adhérer à l’accord de « Partenariat transpacifique global et progressif » — ou CPTPP, pour Comprehensive and Progressive Agreement for Trans-Pacific Partnership, en anglais. Son objectif est aussi de contrer l’influence économique croissante de la Chine.

Ce CPTPP est la nouvelle version du pacte de libre-échange transpacifique (TPP) que Donald Trump avait abandonnée à son arrivée au pouvoir. Il s’agit d’un accord de libre-échange entre les onze pays qui le composent — dont l’Australie, le Canada, le Chili, le Japon, le Mexique et le Viêt Nam. Il représente près de 500 millions de consommateurs dans la région Asie-Pacifique.

Le Premier ministre Boris Johnson : « Nous forgeons de nouveaux partenariats qui apporteront d’énormes avantages économiques au peuple du Royaume-Uni.  Postuler pour devenir le premier nouveau pays à rejoindre le CPTPP prouve notre ambition de faire des affaires dans les meilleures conditions avec nos amis et partenaires partout dans le monde et d’être un fervent champion du libre-échange mondial. »

Le Royaume-Uni a signé récemment deux autres accords de libre-échange avec le Singapour et le Viêt Nam. Les travaillistes sont contre ce projet d’adhésion.

Vo Trung Dung, avec les agences.

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