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Art Vietnam © Dang Xuan Hoa —Tinh Vât & Mèo

Viêt Nam et Royaume-Uni en mode post-Brexit

[Mise à jour du 29 décembre 2020 à 23 heures ] — Le Royaume-Uni et le Viêt Nam ont conclu à Ha Noi les termes pour un nouvel accord de libre-échange — le UKVFTA — le 11 décembre, quelques semaines avant que la Grande-Bretagne n’achève sa transition hors de l’Union européenne à la fin de l’année. En procédure accélérée, l’UKVFTA a été entériné à Londres le 29 décembre 2020. Il entre en application dès 23 heures le 31 décembre 2020.

L’accord garantira que Londres ait l’accès aux tarifs préférentiels — similaires à l’actuel accord de libre-échange entre l’UE et le Viêt Nam (EVFTA), — dans l’une des économies les plus ouvertes et à la croissance la plus rapide d’Asie.

L’ambassade du Royaume-Uni à Ha Noi : « Aujourd’hui, la secrétaire britannique au Commerce international, Liz Truss, et le ministre vietnamien de l’Industrie et du Commerce, Tran Tuan Anh, ont conclu l’accord de libre-échange entre le Royaume-Uni et le Viet Nam. Cela donnera un nouvel élan au commerce bilatéral entre le Royaume-Uni et le Viet Nam, qui a triplé entre 2010 et 2019 pour atteindre 5,7 milliards de livres (7,58 milliards de dollars). »

L’EVFTA est entré en vigueur en août dernier et réduira ou éliminera 99 % des droits de douane sur les biens échangés entre le Viet Nam et l’UE.

A la recherche du libre-échange

Depuis qu’elle a quitté l’Union européenne en janvier 2020, le Royaume-Uni se retrouve seul et doit négocier de nouveaux accords commerciaux avec des pays pour remplacer ceux que l’UE avait négociés.

Frederick Burke, associé du cabinet d’avocats Baker McKenzie basé à Hô Chi Minh-Ville : « C’est le Royaume-Uni qui se démène pour rester dans le coup, c’est l’expression que j’utilise. Pour le Royaume-Uni, s’il parvient à obtenir suffisamment de ces accords commerciaux, il pourra presque se maintenir au niveau de l’époque où il faisait partie de l’UE, mais il n’aura pas les mêmes avantages, car il ne s’agit que d’un accord commercial bilatéral, et non d’un accord commercial européen à part entière. »

Le Viet Nam a adhéré à l’Accord global et progressif de partenariat transpacifique (CPTPP) entre 11 pays il y a deux ans. Et en tant que membre de l’Association des pays de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), il a conclu le mois dernier l’Accord de partenariat économique régional global (RCEP), dont la Chine est le poids lourd.

Londres a exprimé son souhait de se joindre au CPTPP, qui prévoit une réduction des droits de douane dans une grande partie de la région Asie-Pacifique, et a salué le soutien du Viet Nam à cet objectif en septembre.

Jack Nguyen, associé du cabinet de conseil aux entreprises Mazars à Hô Chi Minh-Ville : « Les Britanniques veulent obtenir plus d’investissements haut de gamme et de haute technologie au Viet Nam. Ils veulent mettre leurs produits sur le marché. Ils veulent attirer des fabricants qui s’installent au Viet Nam pour exporter vers d’autres pays. Donc tout accord qui réduira les droits de douane, les barrières commerciales, ils voudront le signer. »

Londres considère que l’accord entre les deux pays est une « étape clé » — par ricochet — vers l’entrée du Royaume-Uni dans le CPTPP.

Le commerce entre le Viet Nam et le Royaume-Uni

Le Viet Nam est le deuxième exportateur d’Asie du Sud-Est vers le Royaume-Uni après la Thaïlande, le commerce bilatéral entre les deux pays s’élevant à 6,7 milliards de dollars américains en 2019.

Les principales exportations vietnamiennes vers le Royaume-Uni comprennent les téléphones portables, les vêtements et textiles, les meubles en bois et les fruits de mer. Le Royaume-Uni vend au Viet Nam des biens et services tels que l’éducation, les énergies renouvelables, la technologie, les équipements industriels, les machines-outils, les infrastructures et les soins de santé.

L’éducation

Le Royaume-Uni est l’un des plus grands investisseurs étrangers dans le secteur de l’éducation au Viet Nam. En outre, l’éducation reste une priorité nationale pour le gouvernement vietnamien.

La classe moyenne et supérieure du Viet Nam préfère l’enseignement privé aux systèmes scolaires publics en raison de la meilleure qualité des services. Cette demande s’est donc traduite par un marché pour les institutions privées et les écoles et services professionnels. Il existe toujours une demande pour des centres de formation en langue anglaise de qualité ainsi que pour l’enseignement supérieur et la formation des enseignants.

En outre, la formation technique et professionnelle est au centre des plans de développement du gouvernement, notamment en raison de l’évolution des emplois à la lumière des développements numériques tels que l’industrie 4.0.

Les énergies renouvelables

Le récent boom du développement de l’énergie solaire au Viet Nam offre de nouvelles opportunités aux entreprises britanniques. La consommation d’énergie du Viet Nam devrait encore augmenter à mesure qu’il se remettra de la récession provoquée par la pandémie.

Le Viet Nam continue à dépendre du charbon, car il est bon marché, mais les progrès technologiques et les préoccupations environnementales rendent les énergies renouvelables plus attrayantes.

Tout récemment, le gouvernement a réitéré sa position de faire en sorte que les énergies renouvelables contribuent à 20 % de son approvisionnement énergétique total d’ici 2030. Il existe une demande de technologie, d’équipement et de formation dans le secteur des énergies renouvelables, dans lequel le Royaume-Uni possède une excellente expertise.

L’infrastructure

Le Viet Nam étant une économie en pleine croissance, la liste des projets d’infrastructure ne cesse de s’allonger. Avec 50 % de la population vietnamienne qui devrait vivre dans les villes d’ici 2030, les autorités de Ha Noi et de Hô Chi Minh-Ville s’efforcent de construire des systèmes de métro ferroviaire pour un montant supérieur à 22 milliards de dollars, dans l’espoir de réduire les embouteillages et d’améliorer la qualité de l’air.

Le gouvernement continue également à travailler sur plusieurs voies rapides et a fait appel à plusieurs investisseurs privés pour le développement et le financement.

L’aéroport de Long Thanh, qui remplacera l’actuel aéroport international Tan Son Nhat de Hô Chi Minh-Ville, surchargé, devrait être achevé d’ici 2025. Le Viet Nam consacre une part importante de son PIB aux infrastructures, qui est l’une des plus élevées d’Asie du Sud-Est.

Les secteurs des chemins de fer et de l’aviation, en particulier, représentent des opportunités importantes pour les entreprises britanniques qui ont des produits et des services pouvant répondre aux besoins du marché vietnamien.

Un grand bémol : la corruption demeure très importante dans ce secteur pour pouvoir obtenir le marché et « gagner » les appels d’offres. Sauf si l’entreprise étrangère possède une expertise exclusive, et les projets impliquent le soutien diplomatique ou bénéficient de l’aide au développement.

Les soins de santé

Une demande accrue de services de santé, mais desservie par des ressources publiques gouvernementales limitées, offre des opportunités de croissance dans le secteur de la santé au Viet Nam. Le pays connaît actuellement des transformations économiques et démographiques qui offriront un grand potentiel dans ce secteur.

Les dépenses de santé devraient atteindre 23 milliards de dollars US en 2022, avec une croissance annuelle composée de 10,7 %, selon Fitch Solutions. Le Viet Nam a une classe moyenne en forte croissance et une population vieillissante. Le développement économique rapide a stimulé la demande de services de santé spécialisés et de meilleure qualité.

Le ministère vietnamien de la Santé (MoH) a prévu que le marché des équipements médicaux du pays connaîtra une croissance de 18 à 20 % entre 2016 et 2020. Cependant, la plupart des équipements médicaux doivent être importés. Les hôpitaux publics manquent également d’équipements suffisants pour les unités de chirurgie et de soins intensifs. Comme la production locale ne peut pas répondre à la demande, le gouvernement vietnamien encourage l’importation d’équipements médicaux et c’est un autre domaine qui se prête bien aux investisseurs britanniques.

Les perspectives

Après un accord de partenariat économique avec le Japon et un accord commercial avec Singapour, le Viet Nam représente le troisième accord commercial du Royaume-Uni en Asie. Pour Londres, ce pacte offre un potentiel important d’expansion des exportations vers le Viet Nam, qui est l’un des marchés émergents à la croissance la plus rapide au monde.

L’accord de libre-échange entre le Royaume-Uni et le Viet Nam — UKVFTA — entre en vigueur le 31 décembre 2020 à 23 heures.

Le Royaume-Uni et le Viet Nam ont renforcé leurs liens dans le cadre d’un partenariat stratégique en 2010 et les échanges commerciaux sont en hausse depuis lors.

Vo Trung Dung

(L’article a été mis à jour à 23 heures le 29 décembre 2020)

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Illustration de Une : © Đặng Xuân Hoà, né en 1959 à Nam-Dinh, est artiste peintre vietnamien. Il vit et travaille à Ha Nôi, Viêt Nam.

L’Histoire de l’art vietnamien retiendra Dang Xuân Hoa comme l’un de ses artistes les plus importants de la fin du 20e siècle. Les peintures de Xuân Hoa montrent à la fois ses racines indéniables au Vietnam et son exposition, et son absorption de l’art de nombreux autres pays et périodes. Dans le style de Hoa, on peut voir l’influence d’artistes tels que Nguyên Tu Nghiêm et Nguyên Sang, Pablo Picasso et Jackson Pollock, mais il conserve toujours son unique personnalité artistique. 

 


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